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SOCIÉTÉ NATIONALE DES ANTIQUAIRES DE FRANCE

Séance du 8 novembre 1882.

Cette séance a été consacrée à des questions administratives et à l'élection de M. l'abbé Thédenat comme membre résidant.

Séance du 15 novembre.

M. Flouest, associé correspondant, présente une superbe épée en bronze, appartenant à la période dite « âge du bronze », qui a été trouvée près de Langres, dans un ancien lit de la Marne, et qui appartient aujourd'hui au musée de Saint-Germain Elle aurait sans doute, conformément à un usage mentionné par un auteur ancien, été jetée dans les eaux à titre d'offrande aux divinités.

M. Mowat annonce qu'il possède une épée trouvée dans des conditions analoguss dans le lit de la Vilaine.

M. Gaidoz rapproche certains usages religieux de la Rome ancienne, de la France et du Congo, et s'élève contre le système qui fait venir de l'Asie toutes les croyances et toutes les pratiques religieuses des peuples européens.

Séance du 22 novembre.

M. Héron de Villefosse lit une note de M. Castan, associé correspondant, sur un anneau en bronze doré du musée de Besançon; le chaton, simple tablette de cristal de roche, est accosté, d'un côté d'un écusson surmonté de la tiare pontifical et renfermant les deux clefs en sautoir, de l'autre d'un saint Georges à cheval perçant de sa lance le dragon. Sur les cartouches en biseau que le chaton surmonte, on lit, d'un côté P. N., de l'autre DVX, les clefs en sautoir sont les armoiries personnelles du pape Nicolas V, dont les initiales se lisent sur un des cartouches, le titre de Dux et le saint Georges appartiennent au doge de Gênes. Or Nicolas V avait cédé au Génois Luigi Fregoso ses droits souverains sur la Corse; celui-ci les retrocéda aussitôt à la République de Gênes, qui en remit la jouissance à la fameuse compagnie appelée « l'office de Saint-Georges ». M. Castan reconnaît dans l'anneau du musée de Besançon l'anneau par lequel l'office de Saint-Georges fut investi en 1453 de la seigneurie de la Corse au double nom de Nicolas V, suzerain de l'ile, et du précédent feudataire, le doge de Gênes.

M. Rayet lit une note sur un fragment de table iliaque trouvé par M. Thierry i Tivoli, et sur lequel sont représentés en abrégé certains épisodes de la guerre & Troie, empruntés à la Destruction de Troie, par Sèschore, et à l'Ethiopide d'Arctines de Milet.

M. Renot informe la Société que la seconde moitié des Arènes de Lutèce, dont la première partie, découverte en 1870, est actuellement cachée sous des bâtimens élevés par la Compagnie des omníbus, est, à son tour, menacée de destruction par un projet de percement de rue. Sur son invitation, la Société renouvelle sa délibé ration du 6 avril 1870 tendant à la conservation de ces restes intéressants du plus ancien monument du Paris romain, et décide que son président fera en ce sens une démarche auprès du conseil municipal.

M. Nicard rectifie quelques erreurs contenues dans la partie du tome II de l'Inventaire général des richesses d'art de la ville de Paris qui concerne les vitraux de Saint-Etienne-du-Mont. Un vitrail représentant le Pressoir mystique et attribué par l'inventaire à Robert Vinaigrier, peintre verrier de la première moitié du xvi siede, est simplement la copie faite par Nicolas Vinaigrier, qui vivait au xvir siècle, d'une verrière peinte par Robert pour Saint-Hilaire de Chartres; cela avait été déjà dit par Emeric David en 1823 dans un article de la Biographie universelle de Michaud. Le secrétaire : O. RAYET.

SOCIÉTÉ ASIATIQUE

Dans sa séance du 10 novembre, la Société asiatique a renouvelé la commission de son Journal. Ont été élus membres de cette commission MM. Defrémery, Barbier de Meynard, F. Senart, Stanislas Guyard et Bergaigne. M. Bergaigne a fait ensuite une intéressante communication sur un hymne védique relatif à la descente du Boma porté sur un aigle. M. Roth avait eu recours, pour expliquer un passage obscur de cet hymne, à des corrections du texte. M. Bergaigne repousse ces correc tions et montré qu'en maintenant l'intégrité du texte on parvient à une interprétation qui confirme le système développé par lui dans ses travaux sur la rhétorique du Rigvéda. — M. Halévy annonce qu'il a réussi à déchiffrer les inscriptions Thamo dites découvertes en Arabie par M. Huber. On sait que les Thamoudites sont us de ces peuplades antiques de l'Arabie que cite le Coran comme ayant été détruites par un châtiment céleste.

Le Puy, imprimerie Marchessou fils, boulevard Saint-Laurent, 23

REVUE CRITIQUE

FOREIGN

PERIODICALS

D'HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE

N° 52

25 Décembre

1882

262. E. CURTIUS, Anti

Sommaire : 261. BARTHOLOMAE, Recherches aryennes.
quité et présent, II. 263. DE RUBLE, Antoine de Bourbon et Jeanne d'Albret,
II. - 264. BREUCKER, La cession de la Poméranie à la Suède. — 265. Valfrey,
Hugues de Lionne et la paix des Pyrénées. Chronique. Académie des Ins-

criptions.

Société nationale des antiquaires de France.

261.

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Arische Forschungen, von Christian BARTHOLOME. Is Heft. pp. vi-178. in-8. Halle, 1882.

Ces nouvelles études de M. Bartholomae se divisent en deux parties très différentes de nature, l'une grammaticale et l'autre exégétique et critique. La première partie se subdivise également en deux sections. Dans l'une, M. B. traite des représentants aryaques des moyennes aspirées et des mêmes moyennes + s; dans l'autre, il analyse le système de la déclinaison des thèmes en r, n, m, j (i) et v (u).

Discutant d'abord la première de ces questions, M. B. pose, comme fondement, les formes sanscrites g2 ht, th=gdh (et semblables) et ght, th=dh (de 'dh); puis, comparant le sanscrit dabdha (de dabh+ta) avec l'avestique dapta, il se demande quelle est la forme indoiranienne qui a précédé l'une et l'autre. Il regrette et l'explication d'Ascoli, qui établit la progression dabh ta — dabtha dabdha, et celle de Schleicher, qui admet un indo-européen dabh-ta et la théorie généralement admise de l'amollissement des consonnes en avestique.

Il pose en principe que le groupe indo-européen ght est devenu d'abord gdh aryaque et de là gh dh iranien.

Par une même suite de raisonnements, il établit également que le groupe ghs est en iranien ghz', gz' et indo-iranien gz'h, et que ghs se montre, en iranien, sous la forme ' dans vaz'h.

Dans la seconde section, M. B. expose, en suivant l'ordre des cas, toutes les formes que revêtent les radicaux unis aux suffixes de flexion selon qu'elles ont pour base le thème renforcé (par exemple, án), le thème simple ou aminci ou que le suffixe flexionel a disparu. Il discute, à cette occasion, la chronologie de ces formes et la légitimité de quelquesunes d'entre elles.

On ne peut contester que la discussion soit conduite d'une manière vraiment scientifique. L'auteur cherche à établir ses théories sur des raisons sérieuses et vise à la plus stricte exactitude. Naturellement, en

Nouvelle série, XIV.

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ces matières, on est souvent réduit à des conjectures et c'est déjà beau coup quand ces conjectures sont toutes plausibles.

Je ne puis entrer dans tous les détails que comporte le sujet; je dois me borner à quelques remarques faites au courant de la lecture. M. B. rejette, avec raison, la forme dabta admise par M. Geldner et l'e syllabique que M. Fick voit en dademaidé; aogda me semble bien être un amollissement d'aokhta quand il signifie « il dit »; pour écarter cette forme, il ne me semble pas suffisant de dire qu'elle est altérée.

Vaghdhanem est bien interprété comme provenant de vagh et du suffixe tana.

M. B. fait dériver (ni) uruzdotema et mazdão de rudh et madh, comme je l'avais fait précédemment. Je ne puis naturellement que l'approuver en ceci. Azdébis' est évidemment le produit d'un amollissement du thème ast, asta. Pour ce cas du moins, comme pour aokhta, l'amollissement ne me paraît pas contestable.

Il est assez difficile d'admettre que la forme â du nominatif des noms en nou r soit la plus ancienne', ou que sakhi provienne de saski par redoublement de la racine sak2. Il faudrait pour cela d'autres exemples de skzkh. Ne serait-ce pas le radical saky qui a engendré sakh? En revanche, l'origine attribuée aux accusatifs en âm, âm de panthâm, gám etc., est certainement la vraie. Ce sont les nominatifs en ás qui en ont entraîné la formation. Le son mouillé attribué à la sifflante sh (Justi) est assez bien justifié par les exemples shu shyu; shấti = shɣáti; yum est bien le vocatif de yuvan; comme je l'ai expliqué depuis longtemps (Avesta traduit, Yesht xxII). L'auteur rapproche très heureusement les suffixes ur, us des troisièmes personnes du pluriel en sanscrit, avec ceux en ares des parfaits avestiques, de même que le génitif sanscrit en us de la forme ars. Les génitifs sakhyus, patyus, etc., forment encore une difficulté. D'autre part, il semble peu probable que l'ablatif et le génitif du singulier aient été originairement identiques et qu'on ne les aient distingués par la suite qu'à la seule déclinaison des noms en á, d'où la forme nouvelle (d, t, ad) se serait étendue aux autres radicaux, en latin et en avestique uniquement. Je croirais plus facilement que ce suffixe s'appliquait d'abord à tous les mots, sans toutefois être arrivé à la fusion complète si ce n'est dans la flexion des mots en a où la forme du génitif (asya) s'appliquait difficilement à l'ablatif.

Les Gâthâs n'ont point le suffixe d (ad) dans les autres déclinaisons, cela est vrai; toutefois, la forme bûnoit, Y. LII, 7, n'en serait-elle point un reste? M. B. penche à la corriger en bûnois'. Il peut avoir raison. mais ce n'est point sûr. — M. B. distingue avec beaucoup de raison les cas où le rythme demande un élargissement des mots de ceux où la correction est exigée par la grammaire. Les premiers peuvent très bien ne représenter qu'un usage poétique. Il rejette la théorie reçue qui admet

1. Même remarque quant au génitif en és, ós, des radicaux -i, -u.

dans la langue avestique l'altération des sons fermés en spirées entre deux voyelles et ne voit dans gâthum, par exemple, qu'une extension par analogie du th de gâthwa. Mais les formes coithat, cithit, dadhẩm (da, donner) et semblables paraissent favorables à l'explication ordinaire, bien que celle de M. B. donne plus de régularité à la langue. La solution de cette question dépend du plus ou moins d'extension que l'on accorde à l'influence de la fausse analogie.

C'est aussi avec juste raison que M. B. raie de la lexicographie avestique les locatifs en ô des radicaux en i, comme je l'avait fait antérieurement (V. mon Manuel, p. 50) Huzâmitô est un nominatif-accusatif pluriel comme le prouve le vers ya vispáo háirishias, huzâmito dadhaiti (Y. LXIV 2) qui fait toutes les femelles ayant d'heureux enfantements, enfantant heureusement. » De même au Yt. xш, 15, huzẩmitô (nom.), zizananti.

Yuto (à Vend., V, 55) est membre d'un composé féminin yutohvaretha, yuto-gâtus; ou bien c'est un nominatif masculin employé dans une formule usuelle, bien qu'il s'agisse ici d'une femme.

Gaodayó est bien certainement un accusatif neutre (comp. mon Avesta traduit, p. 318). Il en est de même de sénghô, Y. xxxii, 6. Neréus' vient bien, je pense, de nerans', neréns' (Cp. mon Manuel, p. 368 init.)

La seconde partie consacrée à la critique et à l'exégèse est aussi très digne d'attention. Elle contient le texte (restitué selon le système de l'auteur) et la traduction des Yeshts XIX (8-96) et I, 5-7, 9-12, 16. 18. 19; des notes explicatives et justificatives accompagnent la version.

La restauration du texte consiste en la reconstruction de strophes régulières de 4 ou de 3 vers, chacun de 8 syllabes, et en l'élimination des mots, membres de phrases ou strophes qui troublent l'harmonie des strophes et des vers.

Les fragments retranchés du texte traditionnel du Y. XIX sont ajoutés en colonnes parallèles au texte restitué, mais sans traduction. Les retranchements plus considérables fait au texte manuscrit du Y. I sont complètement omis.

Je n'ai rien à redire à la manière dont M. B. traite le texte du Y. XIX. On voit même de cette façon comment ces interpolations se sont produites. Tantôt c'est le défaut de mémoire des rédacteurs qui les a induits à transférer un passage d'un endroit à un autre; tantôt c'est une préoccupation religieuse. Ainsi, cette mention que l'on retrouve aux SS 36 et 38, anyô Zarathus'trâ, provient de la sollicitude de l'interpolateur pour la grandeur du prophète, supérieure, à ses yeux, à celle de tout autre humain. Cette interpolation ne prouverait-elle pas que le fond de ce chant est antérieur à la réforme zoroastrienne?

Il n'y aurait ici à regretter, si tout le monde suivait cet exemple, que l'absence complète d'explication ou de traduction des mots et phrases rejetés du texte. Ce sont, malgré tout, des mots iraniens, et leur rejet pur

et simple appauvrirait considérablement notre lexique avestique. Cette remarque s'applique surtout à la restauration du texte du Y. 1, d'où elle fait disparaître des fragments considérables; soit 23 paragra phes sur 33.

N'est-il pas à présumer que, dans des morceaux de ce genre, la prose et les vers se mêlaient, se succédaient alternativement, ou bien qu'ils sont composés de la réunion de divers morceaux séparés, les uns en prose, les autres rythmés?

Je ne puis, en général, qu'approuver la traduction de M. B., laquelle concorde généralement avec la mienne, même en certains points obscurs, par ex. sahvâre, asengâus', as‘viñdra, cinmâni paitibar, duzhvañdru. Voici les seules remarques que j'aurais à faire :

N'est-il pas plus naturel de lire ughrem Kâvayem huarnô, que ugharem k. h.? de même pouru, vohuca, sriraca, plutôt que pouru, vohu, sîraraca (de srîra)? — Dans ahêaya hvarnanhaca tem yazái (tem se rapportant à hvarno), ne vaut-il pas mieux voir une formule générale appliquée ici au hvarenô sans souci de l'accord grammatical? Toutefois l'identité de forme de avem (aom) hvarenô autorise certainement l'explication de M. Bartholomae.

La correction du § 12, aom cithemca astemca, est excellente, et donne un très bon sens à la phrase.

Le mot abda est encore obscur, ni âbád, ni abdân; ni apadha (cf. frabda) ne me paraissent fournir la solution définitive; mais abdán est le mot le plus rapproché de abda. - Aiviama, supérieur en force, accolé à berzat, élevé, est une bonne correction de aiwyâma; de même Kávayem (royal) de Kavayem.

Au S 17, le pluriel dans humataèshu, hûkhtaêshu, etc., semblerait indi quer qu'il s'agit des pensées, paroles et actions et que le v. merthwentem garónmânem a été ajouté après coup, alors que l'on eût inventé les 3 parvis du ciel, humatem, etc., dont parle le Yt. xx11.— Marekhstar après dâtar n'indique-t-il pas l'acte de celui qui polit, perfectionne une statue, un objet quelconque qu'il vient de former. - Aux §§ 31-33, on pourrait conserver presque tous les mots retranchés en commençant avec le § 31 les strophes de 4 vers (cfr. mon Manuel, pp. 160, 161; excepté le dernier vers). Il me semble que dans les mots váraghna, zarathustrâ, etc., le rythme permet de prononcer parfois vârghna, Zarthustra.

M. B. ramène souvent, et avec raison, les génitifs écrits en anám à la forme am; le sens qu'il donne à Vyakhmainyata, réfléchir, penser en soi, est le bon; cela ne prouve-t-il pas que Vrakhna ne vient pas de vyac et ne signifie pas rassembleur? Au § 39, rdhwôzanga peut-il signifier autre chose que « ayant la jambe dressée, toujours debout (vigilant)? Cela concorde très bien avec le mot suivant ahvafnîya, sans sommeil.— S41, Pathanya ne peut-il être formé du suffixe anya? Cela me semble bien possible. - J'ai traduit frazushta comme l'équivalent du sanscrit prajushta (cela me paraît meilleur que le geliebt de Justi) et barôzushta,

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