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ginal et va jusqu'à la fin de la première période (philosophie grecque antérieure à Socrate) comprend les Eléates, Héraclite, Empédocle, les atomistes, Anaxagore, les sophistes. Comme le premier volume, celui-ci a été traduit de l'allemand par M. Emile BOUTROUX, maître de conférences à l'Ecole normale supérieure. Cette traduction est littérale et complète; la seule modification qu'ait faite M. Boutroux, consiste dans l'addition de sous-titres. Désireux de faciliter au lecteur le recours à l'original, M. Boutroux a continué à inscrire en marge les numéros des pages du texte allemand (4me édition); tous les renvois qu'on trouve dans le volume, se rapportent de même aux pages du texte allemand. Les deux volumes de traduction publiés jusqu'ici par M. Boutroux, ne représentent que le cinquième de l'ouvrage de M. Zeller. Il reste Socrate, Platon et Aristote (en deux vols. 3me édit., 1875 et 1879) et la philosophie postérieure à Aristote (en deux vols. 3° édit. 1880 et 1881). Mais M. Boutroux renonce à un travail qu'« il lui est impossible de mener avec la rapidité nécessaire » ; il remet la continuation de cette traduction de la Philosophie des Grecs à MM. Lucien Lévy et Jules LEGRAND, professeurs agrégés de philosophie qui traduiront le deuxième volume de l'original, comprenant Socrate et Platon, et à M. GÉRARD, professeur de philosophie à la Faculté des lettres de Nancy, qui s'est chargé du volume consacré à Aristote.

ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES

Séance du 28 avril 1882.

M. Desjardins communique deux lettres de M. René Cagnat, chargé d'une mission épigraphique en Tunisie. M. Cagnat envoie une nouvelle copie de l'inscription de Kairouan (Corpus inscriptionum Latinarum, VIII, 80), dont il donne un texte plus correct que celui qu'on connaissait jusqu'ici. Dans un lieu appelé l'henchir Zaktoun, qui paraît n'avoir encore été visité par aucun archéologue, M. Cagnat a trouvé les ruines d'un temple et des inscriptions, dont une ainsi conçue :

DIIS AVG SACR...

PRO SALVTE IMP CA.
T AELI HADRIANI ANTONIN...
AVG PII LIBERORVM EIV...
CIVITAS THAC S P F SVF FELICI...

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Plusieurs lettres de la dernière ligne de ce texte sont incertaines; mais les mots CIVITAS THAC ne sont pas douteux, et la résolution de l'abréviation Thac. est donnée par d'autres fragments d'inscriptions trouvés au même endroit, sur lesquels on lit en toutes lettres : CIVITAS THACENSIVM. C'est encore une cité antique, juconnue jusqu'ici, dont on doit la découverte à M. Cagnat. Au Kef, dans une maison en ruines, d'où ont déjà été tirées deux inscriptions précédemment publiées, il vient d'en être découvert une troisième, qui paraît importante. Elle comprend vingt lignes, et contient le procès-verbal d'une séance de l'Ordo de Sicca Veneria. Malheureusement, les sept premières lignes seules se lisent sans difficulté, les treize autres sont mutilées et en partie cachées par une couche de ciment; M. Cagnat n'envoie pas encore la copie complète de ce texte, qui ne pourra peut-être pas être établi avec une complète certitude.

M. Renan ajoute que la commission des inscriptions sémitiques a reçu aussi de M. Cagnat les estampages de six inscriptions néo-puniques.

M. Henri Martin, de l'Académie française, communique une note de M le Dr Hamy, sur des figures et inscriptions gravées dans la roche, qui viennent d'être découvertes à El Hadji Mimoun (Sud-Oranais), 40 kilomètres au nord de Figuig, par M. le capitaine Boucher. On a déjà trouvé en Afrique, à plusieurs reprises, des figures d'hommes et d'animaux gravées sur les roches, et les personnes qui ont étudié ces dessins, M. Duveyrier notamment, ont cru pouvoir leur attribuer une haute ancienneté; l'une des preuves données à l'appui de cette opinion, c'est que, parmi les animaux représentés, on en remarque qui ont aujourd'hui disparu de ces contrées, par exemple l'éléphant. La découverte de M. Boucher fournit une preuve de

plus de l'ancienneté de ces gravures « rupestres ». Sur les roches vues par lui, on distingue à la fois de grandes figures d'animaux, toutes semblables à celles qu'on avait remarquées jusqu'ici, et des inscriptions en caractères relativement très petits, remplissant ces figures, les traversant et les masquant pour ainsi dire en partie au regard. Sans doute, lorsque les figures ont été gravées, ces caractères n'y étaient pas, car ceux qui les ont dessinées ont dû les tracer sur la roche nue. Les figures sont donc nécessairement d'une date antérieure à celle des inscriptions qui les recouvrent. Or, ces inscriptions appartiennent à une écriture dérivée du libyque et qui paraît avoir été en usage vers le temps de notre haut moyen âge. Les figures d'animaux doivent donc remonter au moins à la même époque et peut-être même à l'antiquité. M. Alexandre Bertrand lit une note de M. A. Damour sur les grenats incrustés dans les bijoux de l'époque mérovingienne. Parmi les objets qu'on trouve ordinairement dans les tombeaux mérovingiens, on remarque de petites lames, incrustées dans les bijoux, minces, transparentes, d'une couleur rouge violacée, polies et entièrement planes, qu'on a prises parfois pour des parcelles de verre. M. Damour a examiné ces objets au point de vue de leurs propriétés physiques, dureté, densité, couleurs spectrales, etc. Le résultat de cet examen ne permet pas d'y reconnaître un autre corps que le grenat.

M. P.-Charles Robert présente quelques observations sur un médaillon contorniate de sa collection, qui a déjà été publié et étudié, mais qui ne semble pas avoir été bien compris jusqu'ici. Ce médaillon paraît être du Ive siècle de notre ère. On y voit un appareil composé de deux montants verticaux, reliés en haut et en bas par deux traverses horizontales et supportant un axe, horizontal aussi, sur lequel est adaptée une urne à col étroit. Deux aurigae, à droite et à gauche, mettent la main à cet axe, comme pour le faire tourner. Sur la traverse du bas se voient trois boules; un personnage, debout derrière l'appareil, tient à la main une quatrième boule et l'élève comme pour la mettre en vue. Cavedoni a cru que cet ensemble représentait un orgue. M. Robert y reconnaît l'appareil qui servait, lors des courses du cirque, à faire le tirage au sort des places entre les deux fonctions, suivant un procédé décrit par Constantin Porphyrogénète. On mettait dans l'urne quatre boules, deux pour chaque faction, et on l'agitait trois fois, sans doute en faisant tourner l'axe qui la portait; à chaque fois, une boule tombait; celle qui restait en dernier était la bonne et désignait la faction favorisée. Le même appareil se voit sur un bas-relief découvert à Constantinople et publié en 1845 dans la Revue archéologique, par M. Texier, qui n'a pas bien compris non plus le véritable sens de cette image. L'interprétation de M. Robert fournit une nouvelle preuve en faveur d'une thèse déjà soutenue par lui, à savoir que les médaillons contorniates se rapportent tous à des jeux ou à des spectacles.

M. Halévy commence la lecture d'un mémoire sur les nouvelles inscriptions chaldéennes et la question de Sumer et d'Akkad. Il soutient de nouveau la thèse que le prétendu idiome sumérien ou accadien n'existe pas et qu'il ne faut voir, dans les textes où l'on a cru trouver cet idiome, que de l'assyrien écrit au moyen d'un chiffre ou d'un alphabet de convention. Il pense que le roi de Chaldée qui est mentionné dans les inscriptions trouvées par M. de Sarzec, et que M. Oppert appelle Gudea, se nommait en réalité Nabu.

M. Oppert se plaint de ne trouver dans le mémoire de M. Halévy aucun argument nouveau, mais seulement des théories qui ont déjà été exposées et auxquelles on a répondu depuis longtemps.

Ouvrages présentés de la part des auteurs: par M. P.-Ch. Robert: VALLENTIN (Florian), le Musée epigraphique de Limoges (extrait du Bulletin epigraphique de la Gaule, janv.-fév. 1882); par M. Gaston Paris: 1o le Mistère du Viel Testament, publié, avec introduction, notes et glossaire, par le baron James DE ROTHSCHILD, t. I-III; 2o PERSON (Léonce), Notes critiques et biographiques sur Rotrou;

:

par M. Georges Perrot Bulletin de correspondance hellénique, n° d'avril 1882; — par M. Oppert MARRE (Aristide), Catalogue des étoiles circumpolaires australes observées dans l'ile de Sumatra par Frédéric Houtman en l'année 1600, traduit du hollandais et publie (extrait du Bulletin des sciences mathématiques et astronomiques, 2o série, t. V, 1881).

Julien HAVet.

Le Propriétaire-Gérant: ERNEST LEROUX.

Le Puy, typ. et lith. Marchessou fils, boulevard Saint-Laurent, 23

GODLILI!

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Sommaire : 88. HILD, Etude sur les démons dans la littérature et la religion des Grecs. 89. ANTONA-TRAVERSI, La patrie de Boccace. go. Relation des troubles occasionnés en Provence par l'établissement d'une chambre semestre et du mouvevement dit le Sabre, p. p. SAVINE. VARIÉTÉS: L. LALANNE, Une lettre inédite de Du Cange à Adrien de Valois. Thèses de M. E. Bertrand. Académie des Inscriptions.

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-

Chronique.

88.

Etude sur les démons dans la littérature et la religion des Grecs, par J.-A. HILD. Paris, Hachette. 1881, in-8°, x11-337 pages.

L'étude de M. Hild sur les démons grecs ne saurait être dépourvue de valeur, puisqu'elle est une thèse, soutenue devant la Faculté des lettres de Paris, et qui a valu à son auteur le titre de docteur. Mais, si cette étude atteste des recherches laborieuses et des efforts très sérieux dont il serait injuste de ne pas tenir compte, elle témoigne aussi, disonsle sans détour, d'une certaine inexpérience.

Tout d'abord, M. H. est mal informé des travaux relatifs au sujet qu'il a traité. Il a entendu parler de la dissertation de Gerhard sur le Bon Génie et de l'étude du même auteur sur les Démons et Génies 2; il en a entendu parler; il les cite même en tête de la liste (p. vii) des ouvrages dont il se serait servi. Mais il avoue ensuite ne les avoir pas lues, parce qu'il n'a pu les consulter ». Il y a là de quoi être étonné. Ces deux dissertations, qu'il n'est pas impossible de se procurer isolément, ont été réunies, avec plusieurs autres, M. H. ne devrait pas l'ignorer, dans les Mémoires académiques de Gerhard; ouvrage publié en 1868, à Berlin, chez l'éditeur Reimer, et qui n'est point épuisé. Sait-on quelle a été la conséquence de ce défaut d'informations? M. H., n'ayant pas lu le travail de Gerhard sur le Bon Génie, s'est dispensé de parler, dans son livre, du Bon Génie".

Il ne paraît pas avoir connu davantage la Science des dieux grecs de Welcker, qui pourtant n'est point un ouvrage rare. S'il eût connu cet

1. Ueber Agathodæmon und Bona Dea, dissertation publiée en 1849 dans les mémoires de l'Académie des sciences de Berlin,

2. Ueber Wesen, Verwandtschaft und Ursprung der Daemonen und Genien... 3. P. 130, n. 2.

4. Akademische Abhandlungen, 2 vol. et un atlas de planches.

5. Il se contente de le citer, p. 130, sans le définir, ni l'expliquer. Quant à l'association d'Agathos Daemon et d'Agathé Tyché, quant au serpent, symbole du Bon Génie, il n'en est pas question.

6. Griechische Gotterlehre, 3 vol. 1857-1863.

Nouvelle série, XIII.

20

ouvrage, il n'eût point manqué de profiter des renseignements qui s'y trouvent (III, pp. 213 et suiv.) sur certains démons qui n'appartiennent au cortège d'aucune divinité déterminée. Le démon Sosipolis d'Olympie, le démon Epidotès de Sparte, quelques autres encore, méritaient au moins une mention. Mais M. H. n'a pas lu Welcker. C'est sans doute au même motif qu'il faut attribuer l'absence complète de développements au sujet des démons qui, chez les Grecs, personnifiaient des abstractions et des idées morales, et qui étaient devenus, avec le temps, pour des raisons qu'il eût fallu chercher à déterminer, l'objet d'un véritable culte. A Athènes, il n'y avait pas seulement un autel de la Miséricorde et un autel d'Aidôs; on y voyait encore les autels de Phémé et d'Ormé 1. Après Marathon, les Athéniens élevèrent un temple à Eucléia 2, et une inscription attique nous apprend l'existence d'un prêtre d'Eucléia et d'Eunomia 3. Ces faits, et d'autres semblables, devaient être cités; il eût été intéressant d'en rendre compte. M. H. a-t-il cru que la chose fût étrangère à son sujet ? S'il l'a cru, il s'est trompé, car les mythographes sont d'accord pour faire rentrer ces personifications dans la catégorie des démons, en prenant le mot non au sens strict qu'il chez Hésiode, mais au sens plus large qu'il a de bonne heure acquis. Faut-il s'étonner, après cela, que M. H. n'ait fait aucun usage des monuments figurés qui se rapportaient au sujet de sa thèse ? C'est une proposition aujourd'hui banale, que nulle recherche. de mythologie grecque ne peut se passer de l'étude des monuments. Dans le cas particulier, il est des démons, par exemple ceux du cortège dionysiaque et ceux de la suite d'Aphrodite, qui nous sont surtout connus par les vases peints. Il y avait là une étude qui pouvait fournir la matière d'un chapitre ; étude délicate peut-être, mais indispensable. M. H., mal informé, n'y a même pas songé.

Il y a donc des lacunes dans ce livre. Il y a aussi des erreurs. Nous avons déjà eu, ailleurs, l'occasion d'en relever quelques-unes; nous n'y reviendrons pas. Mais en voici d'autres.

M. H., voulant déterminer la signification du mot dzipov chez Homère, affirme, entre autres choses, que ce mot n'est jamais employé au sens favorable dans l'Odyssée. Il oublie le vers suivant,

ὡς ἔλθοι μὲν κεῖνος ἀνὴρ, ἀγάγοι δέ ὁ δαίμων,

mis dans la bouche du bouvier Philétios, qui exprime le vœu qu'une divinité, évidemment favorable, ramène Ulysse à Ithaque. La vérité est, contrairement à l'affirmation beaucoup trop absolue de M. H., que

1. Pausan., I, 17, 1.

2. Pausan., I, 14, 5.

3. C. I. Gr., no 258.

4. Revue de l'Histoire des Religions, t. IV, 1881, pp. 330 et suiv. (Bulletin critique de la religion grecque.)

5. P. 55, note 2.

6. Odyss., XXI, 201.

plusieurs fois, dans l'Odyssée, le mot daíp.wv n'acquiert un sens défavorable qu'avec les épithètes xaxés et σtuyepós '. M. H. oublie également de mentionner un passage de l'Iliade (III, 420, ze de daípov) où le mot Exipov n'exprime pas, comme ailleurs, l'idée de la divinité en général sans détermination de personnes, mais désigne, au contraire, expressément une divinité déterminée, qui est Aphrodite. D'après ces exemples, il est évident que l'auteur n'a pas fait un relevé exact et complet de tous les passages où se rencontre le mot dzipov, ce qui pourtant était la seule manière d'arriver à en préciser la signification dans la langue homérique. Au lieu de s'armer d'un index d'Homère, il aura compulsé des ouvrages de seconde main.

Une erreur singulière est celle qui se rapporte à Phaéthon. Dans un passage de la Théogonie (v. 985-991) Phaethon, fils de Képhalos et d'Eos, paraît identique à l'étoile de Vénus, et il y est qualifié de òzípov dïog. On ne saurait croire ce que M. H. a découvert dans ces deux mots, et quelles conclusions à vaste portée il a tirées de ses découvertes. Suivant lui, cette épithète de diog « marque la lumineuse nature de Phaethon » ". Je ne disconviens pas que Phaéthon soit un astre brillant, mais je prétends que c'est le mot Paéfov, et non l'épithète dos qui exprime cette signification. Le sens originaire de la racine F et les dévas des Védas n'ont rien à voir ici. Il s'agit simplement de déterminer le sens de og dans la langue épique. Or, dans l'Odyssée, traduira-t-on dics Odusseús par « le lumineux Ulysse », et dïog cuôútys, en parlant d'Eumée, par « le porcher étincelant? Chez Hésiode comme chez Homère, le qualificatif dog implique seulement une idée de supériorité, d'excellence; et Phaethon og signifie Phaethon « être excellent », pas autre chose. M. H. se trompe également sur la valeur du mot dzipov dans ce passage, quand il identifie Phaethon, appelé ici èxípov, aux dzipoves hésiodiques, c'est-à-dire à ces hommes de l'âge d'or, divinisés après leur mort, dont parlent les Travaux et Jours. D'abord, la langue d'une œuvre aussi interpolée que la Théogonie ne saurait être assimilée exactement à la langue de l'œuvre plus authentique d'Hésiode. Ensuite, même dans les Travaux et Jours, le mot exipov, quand il est employé au singulier, ce qui arrive une fois, signifie un dieu, un être divin, et non un homme divinisé. Enfin, Phaéthon, fils d'un mortel et d'une déesse, n'a jamais appartenu à la génération de l'âge d'or. C'est sur ces fausses interprétations que M. H. a édifié un long raisonnement (pp. 108-110), qui se réduit aux propositions. suivantes Phaethon, qui est un astre, est appelé un démon (èzip.wv) dans la Théogonie; donc, tous les démons (zip.oves) des Travaux et Jours sont des astres. Nous laissons aux logiciens à juger de la valeur de ce raisonnement, et nous leur soumettons l'hypothèse que voici et qui

1. Par exemple, Ody ́ss., X, 64; XXI, 194.

2. P. 108.

3. Vers 3:4, éd. Goettling-Flach.

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