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être gloüistri] ». La correction n'est pas justifiée: glouistr est un pluriel en i interne aussi légitime que le van. meistr, mistr maîtres, etc., voir Rev. celt., XIV, 307, 308; Gloss. v. eugenn. Y a-t-il eu influence du second gloestr, = "gou-lestr, sur le premier, qui répond au moy.-bret. et léon. goestl? J'admettrais plutôt une contamination avec cloestre cloître Châl., dont la forme léonaise cloastr m. pl. ou Gr., moy.-bret. cloastr, se prêtait moins à cette assimilation. Ce dialecte a, d'ailleurs, aussi claustr m. pl. ou id. Gr., qui doit être pour quelque chose dans la transformation de coustele, coustle f. pl. eu Gr., cousstelé f. pl. yeu l'A., gageure (mot van., = gall. cyngwystledd m. id., cf. cyngwystl, cywystl gage mutuel) en claustle, claustre f. pl. -lëou Gr., Gloss. 128. Maunoir donne même claustr « gage ». Roussel ms porte : « claoustre, claustré, gageure, pari. Lacat en claoustre mettre en gage, faire un pari, une gageure, gager, parier. claoustrea est Caoustrea gager Claoustrêt parié. gagé. » Est remplace ici et. Pel. n'a pas cette forme curieuse caoustrea; il ne parle que du nom claustre. Grég. donne en van. ur goustele, ur oustele; cette dernière expression paraît influencée par le simple goestl, dont elle garderait ainsi une trace en van., cf. moy.-bret. goustlouo il gagera (des gardes).

On voit que dans ces mots l'addition de l est accompagnée du changement d'l en r après st. Cf. cornouaillais flustr et fustl fléau pour battre le blé; cornou. fustl châtiment Barz. Breiz 232 (moy.-bret. fust manche de fléau, mod. id. Maun., Gr., Roussel ms, masc. Gon., etc.).

Flistra jaillir ne vient sans doute pas directement de "fistulare: cf. v. franç. frestel flûte. C'est l'influence de ce verbe qui a fait, en van., donner à fouistr' (poire) molle une variante flistr' (fruit) plus que mûr, Gloss. 338.

Le bret. moy. drouc fleusqueur traduit «< (le tonnerre... et) les exhalaisons malignes », Poèmes bret. 67, d'après le lat. fluxura, a dû être à peu près synonyme du mot qui le précède,

reux bruit, fracas; Mil. ms porte: « fleûskeûr.ne chomo ket eno da zerchel kement-se a fleûskeûr, il ne restera pas là à avoir tant d'embarras et de tracas (Ile de Batz) ». Peut-être y a-t-il quelque rapport avec fuskuilla que Trd. rend par «< trembloter»; mais ce dernier ne serait-il pas dû à une dissimilation de *fluskulia pour *fleuskeuria s'agiter? Cf. flanella, fanella flanelle; moy. bret. flourdelis lis, mod. fourdillis; van. flaouitein sonder (du beurre), futéale sonder, pressentir (quelqu'un), Gloss. 239, 240. Fleusqueur s'accorde parfaitement, pour la forme, avec le van. flossquèrr f. fossé, flosquêr dizeurérr tranchée, cf. flossquic petit fossé, dérivé avec métathèse de foscl=fossicula, Gloss. 242. On peut ajouter le van. diflosquein « eclier ou éclisser » Châl., diflosqueiñ <«<éclisser, parlant du bois qui s'éclisse » Gr. (dont Troude a fait diflaskein se briser en éclats); difflosquet (membre) disloqué, déchiré Choège ...a gannenneu, Vannes 1829, p. 105, 108. Le v. franç. fruschier, froissier briser, dont M. Henry propose de tirer difloskein, en est phonétiquement bien loin; il est préférable de supposer que ce mot, avant de se dire de l'arbre dont on arrache une branche, etc., s'est appliqué aux terres déchirées par une tranchée. La conciliation des sens de fleusqueur et de flosquêr se ferait en conjecturant que le premier a développé l'idée accessoire de «fossé à traverser », « retranchement à forcer », d'où en général «< obstacle, embarras, train, agitation ». Flosquêr, fleusqueur serait donc un pluriel (proprement collectif, en -aur-ārium) de flosc-, *foscl diminutif de fos fosse. Cf. fezier, plur. du simple, Ztschr. f. cell. Philol., I, 234; van. cloher, moy. bret. clocher clocher, mod. clogor cloches aux mains, ampoules, yeux du fromage, 237; moy. bret. ferchieur, van. ferhérr fourches, 233, 234.

Je ne connais pas d'autre pluriel moy. bret. en -eur ou -er non précédé de i; mais leur existence ancienne est assurée, tant par la survivance de clogor que par l'accord du vannetais

-ér avec le v. gall. -aur, mod. -awr (voir ibid. 233-235). Le van., qui a clehér (et clehyér) cloches à côté de cloher clocher, a pu perdre une forme "flesker, dont le correspondant léonais *flesqueur expliquerait le bret. moy. fleusqueur, mieux qu'un type strictement phonétique *flosqueur; cf. moy. bret. nebeut et neubeut peu; voir Gloss. v. ebeul, etc.

An flemeterr fumeterre Nom. 85, flemmeter Gr., est le mot franç. influencé par flemm aiguillon; Grég. donne aussi flémm-douar, avec bretonisation complète (cf. plus haut, § 67, le cas de vif-argent). Voir E. Rolland, Flore populaire, I, 207.

Le bret. a confondu gloar gloire et goard garde dans l'expression en goard Doue, à la garde de Dieu, qui est devenue e gloar Doue, etc., Gloss. 260, 261.

Goareg ar glao (l'arc de la pluie) l'arc-en-ciel, a donné aussi par corruption en tréc. kloarek ar glâ « le clerc de la pluie », Rev. celt., III, 450, cf. VI, 392; Mélusine, II, 13.

(A suivre).

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MOINES ET LES BIENS ECCLÉSIASTIQUES LE HAUT CLERGÉ
LE BAS CLERGÉ; RELATIONS ENTRE LES PAYSANS ET LES
RECTEURS; ATTITUDE DU BAS CLERGÉ A LA VEILLE DE LA
RÉVOLUTION LES DIMES.

Quels rapports entretenaient les paysans bretons avec leurs recteurs, que pensaient-ils du clergé, à la fin de l'ancien régime?

La question est complexe; avant d'y répondre, nous croyons devoir exposer d'abord brièvement quels étaient les sentiments religieux des paysans.

Les cahiers des paroisses nous donnent, en somme, peu de renseignements à ce sujet. Le point de vue purement spirituel de la question religieuse préoccupait sans doute médiocrement les paysans; jamais, sous leurs yeux, on n'attaquait la religion, et,

du reste, ils pouvaient laisser le soin de la défendre à leurs recteurs, qui, dans les jours mêmes où les paysans se réunissaient dans les paroisses, tenaient au chef lieu de leur diocèse une assemblée générale du bas clergé (1).

Pourtant, çà et là, dans les cahiers, apparaît l'attachement des paysans à la religion catholique. On ne voit jamais demander une seule réforme qui portât sur le dogme. Les vœux se rapportent seulement à l'organisation de l'Eglise, à la discipline ecclésiastique (2).

Et quelques assemblées ont donné à leurs députés le mandat de veiller à ce que l'on ne touchât pas à la religion. Les paroissiens de Soulvache adhèrent aux cahiers des autres paroisses, mais ils ajoutent : « Parce que néanmoins on ne pourra toucher directement ni indirectement à notre religion catholique (3). »

Le cahier de Livré demande même la suppression de la tolérance religieuse.

D'autres vœux montrent le respect des paysans pour tout ce qui se rapporte à la religion.

Quelques assemblées se préoccupent d'assurer aux recteurs «<le respect qui leur est dû(4). » Ailleurs, on rappelle une Ordonnance de Louis XIV, sur la tenue qu'on est obligé de garder dans les églises (5).

Les paysans tiennent beaucoup à pouvoir assister à la messe le dimanche (6). Assez fréquemment on demande un deuxième

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(1) L'assemblée du bas clergé du diocèse de Rennes s'ouvrit le 2 avril. (2) Et encore, la suppression du Concordat de François Ier et de Léon X, le retour à la pragmatique sanction ne sont-ils guère demandés que par des villes (Redon (31), Guingamp). Ce qui est remarquable dans les vœux des paysans se rapportant à l'état ecclésiastique, c'est que la question financière, la question des biens de l'église, paraît dominer toutes leurs préoccupations à ce sujet. Beaucoup de leurs vœux n'ont évidemment pour but que de permettre au fisc de mettre la main sur les revenus des moines.

(3) Cf. aussi les cahiers de L'Alleu Saint-Jouin, de Montevert. (4) Cah. de La Bouillie, Saint-Alban.

(5) Ordonnance du 13 mai 1650. Cf. cah. de La Bouillie.

(6) Cf. cah. de Tinténiac. On force les vassaux à travailler pour le seigneur le dimanche. Incident à ce sujet. On pourrait croire que les paysans tenaient moins dans cette occasion à aller à la messe qu'à se dérober aux corvées seigneuriales. Mais on en voit, dans d'autres paroisses, payer eux-mêmes un curé pour dire une deuxième messe, à leur commodité.

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