LIVRE V. éjà le matin avançant ses pas de rose dans les régions de l'Est, semait la terre de perle orientale, lorsqu'ADAM s'éveilla, telle était sa coutume; car son sommeil léger comme l'air, entretenu par une digestion pure et des vapeurs douces et tempérées, était légèrement dispersé par le seul bruit des ruisseaux fumans, des feuilles agitées (éventail de l'aurore), et par le chant matinal et animé des oiseaux sur toutes les branches : il est d'autant plus étonné de trouver Ève non éveillée la chevelure en désordre et les joues rouges comme dans un repos inquiet. Il se soulève à demi, appuyé sur le coude; penché amoureusement sur elle, il contemple avec des regards d'un cordial amour la beauté qui, éveillée ou endormie, brille de graces particulières. Alors d'une voix douce, comme quand Zéphir souffle sur Flore, touchant doucement la main d'ÈVE, il murmure ces mots : "Awake, My fairest, my espoused, my latest found, Such whispering waked her, but with startled eye On Adam; whom embracing, thus she spake : "O sole in whom my thoughts find all repose, My glory, my perfection; glad I see Thy face, and morn return'd; for I this night If dream'd, not, as I oft am wont, of thee, «< Eveille-toi, ma très-belle, mon épouse, mon » dernier bien trouvé, le meilleur et le dernier présent du ciel, mon délice toujours nouveau ! >> Eveille-toi! Le matin brille, et la fraîche cam>>pagne nous appelle; nous perdons les pré» mices du jour, le moment de remarquer com»ment poussent nos plantes soignées, comment >> fleurit le bocage de citronnier, d'où coule la myrrhe, et ce que distille le balsamique roseau, >> comment la nature peint ses couleurs, com» ment l'abeille se pose sur la fleur pour en ex» traire la douceur liquide.»> Ainsi murmurant, il l'éveille, mais jetant sur Adam un œil effrayé, et l'embrassant, elle parla ainsi : « O toi, le seul en qui mes pensées trouvent » tout repos, ma gloire, ma perfection! que j'ai » de joie de voir ton visage et le matin revenu! » Cette nuit (jusqu'à présent je n'ai jamais passé >> une nuit pareille), je rêvais (si je rêvais) non de toi, comme je le fais souvent, non des ouvrages » du jour passé, ou du projet du lendemain » mais d'offense et de trouble que mon esprit ne >> connut jamais avant cette nuit accablante. Il » m'a semblé que quelqu'un, attaché à mon » oreille, m'appelait avec une voix douce, pour » me promener; je crus que c'était la tienne; elle >> disait: Pourquoi dors - tu, EVE? Voici l'heure The cool, the silent, save where silence yields I rose as at thy call, but found thee not; One shaped and wing'd like one of those from heaven And, O fair plant, said he, with fruit surcharged, charmante, fraîche, silencieuse, sauf où le >> silence cède à l'oiseau harmonieux de la nuit qui maintenant éveillé, soupire sa plus douce chanson, enseignée par l'amour. La lune, remplissant tout son orbe, règne, et avec une plus agréable clarté fait ressortir sur l'ombre la face >> des choses; c'est en vain si personne ne regarde. » Le ciel veille avec tous ses yeux, pour qui contempler, si ce n'est toi, ô Désir de la nature? » A ta vue, toutes les choses se réjouissent, atti>> rées par ta beauté pour l'admirer toujours avec >> ravissement. » Je me suis levé à ton appel, mais je ne t'ai » point trouvé. Pour te chercher, j'ai dirigé alors >> ma promenade; il m'a semblé que je passais » seule des chemins qui m'ont conduite tout à >> coup à l'arbre de la Science défendue; il parais>> sait beau, beaucoup plus beau à mon imagina» tion que pendant le jour. Et comme je le regardais en m'étonnant, une figure se tenait auprès, semblable par la forme et les ailes à l'un de ceux-là du ciel que nous avons vu souvent : >> ses cheveux humides de rosée exhalaient l'am >> broisie; il contemplait l'arbre aussi : » Et il disait : « O belle plante, de fruit sur» chargée, personne ne daigne-t-il te soulager e » ton poids et goûter de ta douceur, ni Dieu ni >> homme? La science est-elle si méprisée ? L'envie, » ou quelque réserve, défend – elle de goûter? Le >>> défende qui voudra, nul ne me privera plus III. 22 |