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» fort bien. Et nos magistrats? - Des scélérats.

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On ne peut pas mieux. Compte à présent » les spectateurs. Quel est le plus grand nombre? » Sont-ce les gens de bien? Examine. - Les scélé» rats l'emportent, je l'avoue. - Eh bien! qu'as-tu » à dire à présent? Que j'ai perdu. Messieurs, » prenez mon manteau; je vais passer de votre » côté : vous êtes les plus forts. »

Phidippide profite si bien des leçons de la philosophie et de la connaissance du juste et de l'injuste, qu'il bat ses créanciers qui viennent lui demander de l'argent, et finit par battre son pere, et lui prouver philosophiquement qu'il a le droit de le battre. Des philosophes de nos jours ont prouvé bien pis; mais jamais on n'a ouï dire que ce fût là la philosophie de Socrate.

On ne saurait lire avec quelque attention les ouvrages d'Aristophane, sans se demander à soimême, premiérement, quels motifs ont pu autoriser, pendant un certain tems, un genre de spectacle qu'on ne retrouve chez aucune autre nation, et qui même finit par être entiérement aboli dans Athenes; ensuite, comment ce peuple, si sévere sur l'article de la religion, pouvait permettre que ses dieux fussent tournés en ridicule. sur le théâtre; enfin, comment un peuple si poli

pouvait s'accommoder des saletés grossieres que l'on proférait devant lui. Je vais tâcher de rendre compte de toutes ces questions, non par une dissertation en forme, mais en m'arrêtant simplement à ce qui peut fournir une solution probable, claire et précise.

On

peut d'abord poser en principe que le spectacle dramatique doit, par sa nature même, dépendre beaucoup du gouvernement, du caractere et des mœurs des différens peuples. Il doit donc varier, à un certain point, suivant les divers pays où il s'établit, et suivant les diverses époques chez une même nation : c'est ce qui arriva chez les Athéniens. Échappés à la tyrannie après l'expulsion des Pysistratides, ils passerent à l'extrême liberté et à tous les abus de la démocratie. Ces abus furent balancés par l'esprit patriotique qui anima toute la Grece au moment des invasions de Darius et de Xerxès. Mais comme le danger menaçant avait fait naître les grandes vertus et produit les grands efforts, la victoire et la prospérité amenerent à leur suite l'orgueil et la corruption. Le peuple d'Athenes fut enivré tout à la fois de son pouvoir et de sa fortune. Chez lui il était maître du gouvernement, et au dehors il donnait la loi aux peuples de la Grece. Les grandshommes dont cette puissance était l'ouvrage,

éprouverent tous cette ingratitude que l'on couvrair du prétexte de la liberté, mais qui n'avait d'autre cause que la jalousie naturelle aux républicains, qui commencent à craindre leurs défenseurs quand ils ne craignent plus d'ennemis. Enfin, Athenes était la république la plus puissante, la plus riche, la plus vaine et la plus corrompue de toute la Grece, au tems de Périclès, qui fut celui d'Aristophane. Périclès lui-même, qui d'ailleurs mérita si bien de sa patrie, et dont le plus grand talent fut de bien connaître à quel peuple il avait affaire, sentit la nécessité de le flatter pour conserver le pouvoir de lui faire du bien, et s'attira le reproche d'avoir augmenté encore l'esprit démocratique, qu'il eût été à souhaiter que l'on pût restreindre. Il n'osa pas s'opposer à la licence d'Aristophane, parce qu'il sentit qu'elle plaisait à la multitude, qui semblait regarder cette espece de censure publique comme un des priviléges de la liberté. Ce mot seul est si imposant et si spécieux, qu'aujourd'hui même bien des gens, tout en condamnant Aristophane, pensent qu'un poëte comique de cette trempé pouvait être fort utile dans une république. Oai, sans doute, s'il était possible de s'assurer qu'un homme chargé de faire sur le théâtre les fonctions de censeur, fût l'organe incorruptible de la justice et de la vérité. Mais avec un peu de réflexion, comment

ne voit-on pas que celui même qui serait digne qu'on lui confiât un si dangereux ministere, commencerait par le refuser, fondé sur un principe incontestable, que toute accusation qu'il est permis d'intenter, sans avoir besoin de preuve et sans craindre une réponse, est par cela même une lâcheté et une calomnie? Je consens que, dans une république, il soit permis à tout citoyen d'en accuser un autre; oui, mais légalement, mais dans les tribunaux, mais de maniere que l'accusé puisse se défendre. Et quelle réponse à la diffamation, aux injures, aux railleries, aux insinuations malignes et perfides qu'on peut accumuler dans une satyre dramatique? Quand on parle tout seul aux hommes rassemblés, et qu'on ne veut que les amuser aux dépens d'un particulier qu'on leur immole, a-t-on besoin de dire la vérité pour le rendre odieux ou ridicule? Et n'est-ce pas là au contraire que le mensonge trouve tout naturellement sa place? Ce principe, évident par lui-même, n'est-il pas confirmé par les faits? La plupart de ceux qu'Aristophane déchirait avec tant de fureur, n'étaientils pas en tout genre les hommes les plus estimables de leur tems? Écoutons, sur ce point, Cicéron, qui ne peut être suspect, et qui était aussi bon républicain qu'un autre. Comment parlet-il de l'ancienne comédie des Grecs, de celle

dont il est ici question? « Qui a-t-elle épargné ?

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qui n'a-t-elle pas outragé? Encore si ses traits » ne fussent tombés que sur de mauvais citoyens, » sur un Cléon, un Hyperbolus, un Cléophon, » l'on pourrait le souffrir; mais qu'un homme » tel que Périclès, après tant d'années de ser» vices rendus à son pays, dans la guerre et dans » la paix, soit insulté sur le théâtre et noirci » dans des vers satyriques, cela est aussi indé» cent que si, parmi nous, Nævius ou Cécilius » avaient osé injurier Caton le censeur ou Scipion » l'Africain. »

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Ce n'est pas que je prétende ôter au théâtre son influence sur l'esprit public, influence étouffée sous le despotisme, et par conséquent précieuse aux États libres. Je veux au contraire la rendre plus puissante et plus utile, en substituant à la diffamation personnelle, qui peut menacer également le vice et la vertu, et qui est d'ailleurs à la portée du plus médiocre écrivain, une espece de censure dramatique qui suppose à la fois, et plus de talent, et plus de morale, et qui est en même tems susceptible d'un plus grand effet. Je dis aux poëtes Peignez en caracteres généraux les amis et les ennemis de la chose publique : si vos caracteres sont bien conçus et bien prononcés, les individus y rentreront d'eux-mêmes; ils

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