doute bon que, dans les séances subséquentes; j'applique de tems en tems à chacun des principes sur lesquels je reviendrai, quelques-uns des morceaux les plus frappans d'éloquence grecque ou latine, que je mettrai sous vos yeux. CHAPITRE II I. Explication des différens moyens de l'art oratoire, considérés particuliérement, dans Démosthene. SECTION PREMIERE. Des orateurs qui ont précédé Démosthene, et du UN trait remarquable dans l'histoire de l'esprit 1 précédé le sien, il n'est resté que le souvenir d'une puissance renversée; mais les arts de l'imagination, le goût, le génie, ont été du moins le noble héritage que l'ancienne liberté nous a transmis, et que nous avons recueilli dans les débris de Rome et d'Athenes. Ces arts si brillans, portés à un si haut point de perfection, eurent, comme toutes les choses humaines ; de faibles commencemens. Ce qui nous reste d'Antiphon, d'Andocide, de Lycurgue le rhéteur, d'Hérode, de Lesbonax, ne s'éleve pas au dessus de la médiocrité. Périclès, Lysias, Isocrate, Hypéride, Isée, Eschine, paraissent avoir été les premiers dans le second rang, car Démosthene est seul dans le sien. On remarque dans ce qui nous reste d'Isocrate, une diction ornée, élégante; de la douceur, de la grâce, surtout une harmonie soignée avec un scrupule qui est peut-être porté trop loin. Sa timidité naturelle et la faiblesse de son organe l'éloignerent du barreau et de la tribune; mais il se procura une autre espece d'illustration en ouvrant une école d'éloquence, qui fut pendant plus de soixante ans la plus célebre de toute la Grece, et rendit de grands services à l'art oras toire, comme l'atteste Cicéron dans son jugement sur les orateurs grecs. Je ne puis mieux faire que de rapporter ce précis fait par un juge si distingué, et qui était beaucoup plus près que nous des objets dont il parlait. « C'est dans Athenes (dit-il ) qu'exista le pre»mier orateur, et cet orateur fut Périclès. Avant » lui et Thucydide son contemporain, on ne trouve » rien qui ressemble à la véritable éloquence. On » croit cependant que, long-tems auparavant, le » vieux Solon, Pisistrate et Clisthene avaient du » mérite pour leur tems. Après eux, Thémistocle " parut supérieur aux autres par le talent de la parole, comme par ses lumieres en politique. » Enfin Périclès, renommé par tant d'autres qualités, le fut surtout par celle de grand orateur. On » convient aussi que, dans le même tems, Cléon, quoique citoyen turbulent, n'en fut pas moins » un homme éloquent. A la même époque se pré» sentent Alcibiade, Critias, Théramene : comme il ne nous reste rien d'aucun d'eux, ce n'est » guere que par les écrits de Thucydide que nous pouvons conjecturer quel était le goût qui régnait " alors. Leur style était noble, élevé, sentencieux, plein dans sa précision, mais par sa précision » même un peu obscur. Dès que l'on s'aperçut » de l'effet que pouvait produire un discours bien composé, bientôt il y eut des gens qui se don» nerent pour professeurs dans l'art de parler. Gorgias le Léontin, Trasimaque de Calcédoine, " Protagore d'Abdere, Prodique de l'île de Cos, Hippias d'Élée et beaucoup d'autres se firent » un nom dans ce genre. Mais leur prétention res>>> semblait trop à la jactance; car ils se vantaient d'enseigner comment d'une mauvaise cause on pouvait en faire une bonne. C'est contre ces sophistes (1) que s'éleva Socrate, qui employa, pour les combattre, toute la subtilité de la dialec رو tique. Ses fréquentes leçons formerent beaucoup » de savans hommes, et c'est alors que la morale » commença à faire partie de la philosophie, qui jusque-là ne s'était occupée que des sciences physiques. » Tous ceux dont je viens de parler étaient déjà » sur leur déclin lorsque parut Isocrate, dont la » maison devint l'école de la Grece, grand ora»teur, maître parfait, et qui sans briller dans les tribunaux, sans sortir de chez lui, parvint à un degré de célébrité où dans le même genre nul ne » s'est élevé depuis. Il écrivit bien, et apprit aux » autres à bien écrire. Il connut mieux que ses pré» décesseurs l'art oratoire dans toutes ses parties; » mais surtout il fut le premier à comprendre que » si la prose ne doit point avoir le rhythme du vers, دو (1) Voilà la preuve de ce qui a été dit ci-dessus, que les sophistes avaient été les premiers à professer la rhétorique. » elle |