Et d'un être infini je me suis souvenu Dès le premier instant que je me suis connu.
Racine le fils, Poëme de la Religion.
La peinture de la mer qu'a faite ici le poëte frappera tout homme de goût. Quelle grandeur dans les différens attributs qu'il donne à cet élément! Et toi dont le courroux veut engloutir la terre....... Il y peint admirablement l'effroi que la mer en fureur inspire aux gens qui confient leur vie à cet élément. Cette figure , qu'il emploie en faisant parler la terre, fait une impression des plus vives sur l'esprit : Est-ce moi qui produis mes riches ornemens ? Le portrait de l'homme est de main de maître ; tout y est fini : on y voit tous les mouvemens de son âme peints sur son front. Le don admirable de la parole y est célébré comme le mérite un tel présent de la nature. Ceux de la vue et de la mémoire ont leur coup de pinceau convenable. La conséquence qu'il tire de toutes les merveilles qu'étale ce vaste univers, c'est que nous devons reconnaître qu'il a un auteur, et que cet auteur n'est autre chose que Dieu.
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Le célèbre Rousseau dépeint ainsi les merveilles de la puissance de Dieu qui éclate dans la création de l'univers. C'est une paraphrase d'une partie du psaume 18.
Les cieux instruisent la terre A révérer leur auteur : Tout ce que le globe enserre Célèbre un Dieu créateur. Quel plus sublime cantique Que ce concert magnifique De tous les célestes corps ! Quelle grandeur infinie! Quelle divine harmonie Résulte de leurs accords!
De sa puissance immortelle Tout parle, tout nous instruit : La nuit l'annonce à la nuit; Le jour au jour la réyèle. Ce grand et superbe ouvrage N'est point pour l'homme un langage Obscur et mystérieux ; Son admirable structure Est la voix de la nature Qui sc fait entendre aux yeux. Dans une éclatante voûte Il a placé de ses mains Le soleil qui, dans sa route, Éclaire tous les humains. Environné de lumière, Cet astre ouvre sa carrière Comme un époux glorieux, Qui dès l'aube matinale De sa couche nuptiale Sort brillant et radieux... Comme un époux glorieux, etc.
On reconnaît ici la main de l'illustre Rousseau. Ce qui domine le plus dans ce poëte lyrique, c'est le ton sublime qu'il sait donner aux sujets qui demandent une grande élévation. C'est aussi là qu'il triomphe. Quelle grandeur dans les idées ? Quelle richesse, et quelle magnificence dans les expressions ! on peut dire en un sens de ses odes , ce qu'il dit lui-même du soleil et des astres : Quelle divine harmonie résulte de leurs accords ! Est-il rien de plus pompeux que cette image ? Dans une éclatante voûte il a placé de ses mains , etc. Peut-on rendre avec plus d'énergie et de beauté le verset de ce psaume ? Et ipse tanquàm sponsus procedens de thalamo suo.
d'innocence de nos premiers parens , et des suites funestes de leur désobéissance.
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Le soleil commençait ses routes ordonnées ; Les ondes dans leur lit étaient emprisonnées. Déjà le tendre oiseau , s'élevant dans les airs, Bénissait son auteur par ses nouveaux concerts. Mais il manquait encore un maître à tout l'ouvrage Faisons l'homme, dit Dieu , faisons-le à notre image. Soudain , pétri de boue, et d'un souffle animé, Ce chef-d'oeuvre connut qu'un Dieu l'avait formé. La nature, attentive aux besoins de son maître, Lui présenta les fruits que son sein faisait naitre; Et l'univers, soumis à cette aimable loi, Conapira tout entier au bonheur de son roi. La fatigne, la faim, la soif , la maladie, Ne pouvaient altérer le repos de sa vie; La mort même n'osait déranger ces ressorts Que le souffle divin anima dans son corps. Il n'eut point à dompter une chair insolente. L'ordre régnait alors, tout était dans son lieu; L'animal craignait l'homme, et l'homme craignait Dieu... Tel fut l'homme innocent : sa race infortunée Des mêmes droits que lui devait se voir ornée, Et conçu chastement, enfanté sans douleur, L'enfant ne se fut point annoncé par ses pleurs. Vous n'eussiez vu jamais une mère tremblante Soutenir de son fils la marche 'chancelánte. Réchauffer son corps froid dans la dure saison, Ni par les châtimens appeler sa raison. Le démon contre nous eût eu de faibles armes. Hélas ! ce souvenir produit de vaines larmes. Que sert de regretter un état qui n'est plus, Et de peindre un séjour dont nous fûmes exclus? Pleurons notre disgrâce , et parlons des misères Que sur nous attira la chute de nos pères. Condamnés à la mort, destinés aux travaux', Les travaux et la mort furent nos moindres maux. Au corps, tyran cruel, notre âme assujétie, Vers les terrestres biens languit appesantie. De mensonge et d'horreur un voile ténébreux Nous dérobe le jour qui doit nous rendre heureux. La nature, autrefois attentive à nous plaire, Contre nous irritée , en tout nous est contraire. La terre dans son sein resserre ses trésors : Il faut les arracher, il faut, par nos efforts , Lui rayir de ses biens la pénible récolte.
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Contre son souverain l'animal se révolte ; Le maître de la terre appréhende les vers; L'insecte se fait craindre au roi de l'univers. L'homme, à sa femme uni, met au jour des coupables, D'un père malheureux héritiers déplorables. Aux solides ayis, l'enfant toujours rétif, Par la seule menace y devient attentif; De l'âge et des leçons, sa raison fécondée, A peine du vrai Dieu lui retrace l'idée. Hélas ! à ces malheurs, par sa femme séduit, Adam, le faible Adam, avec nous s'est réduit : Son crime fut le nôtre, et ce père infidèle Rendit toute sa race à jamais criminelle. Ainsi le tronc qui meurt voit mourir ses rameaux, Et la source infectée infecte ses ruisseaux... Mais malgré cette nuit sur l'homme répandue , On découvre un rayon de sa gloire perdue.. C'est du haut de son trône un roi précipité, Qui garde sur son front un trait de majesté. Une secrète voix à toute heure lui crie Que la terre n'est point son heureuse patrie , Qu'au ciel il doit attendre un état plus parfaii Et lui-même ici-bas quand est-il satisfait? Digne de posséder un royaume solide , Plein de biens et d'honneurs, il reste toujours vide; Il forme encor des voeux dans le sein du plaisir, Il n'est jamais enfin qu'un éternel désir. D'où lui vient sa grandeur ? d'où lui vient sa bassesse ? Et pourquoi tant de force avec tant de faiblesse? Réveillez-vous, mortels, dans la nuit absorbés, Reconnaissez du moins d'où vous êtes tombés.
Racine le fils.
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REMARQUES. On doit convenir que toute cette matière est traités avec la dignité qu'elle demandait. Les réflexions dont elle est variée sont également ingénieuses et solides. Le portrait des maux qui furent les suites de la dés obéissance de notre premier père, est d'un détail que le poëte à su rendre intéressant, quoique nous soyons convaincus de ces vérités. Mais il ne faut pas passer cet endroit sans remarquer la noble et juste idée qu'il donne de l'homme après le péché : 'C'est du haut de son trône un roi precipite.
Il en est de même de la peinture qu'il fait du cour humain, et de ce composé inexplicable de grandeur et de faiblesse qu'on y aperçoit.
On ne sera pas fâché de voir ici comment le célèbre Boileau a traité une partie du même sujet , c'est-àdire l'état d'innocence du premier homme, et les suites de son péché. Le morceau est beaucoup plus court, mais il a ses beautés.
Hélas ! ayant ce jour qui perdit ses neveux Tous les plaisirs couraient au-devant de ses voeux. La faim aus animaux ne faisait point la guerre, Le blê, pour se donner, sans peine ouvrant la terre, N'attendait pas qu'un bæuf pressé de l'aiguillon Traçât à pas tardifs un pénible sillon. La vigne offrait partout des grappes toujours pleines , Et des ruisseaux de lait serpentaient dans les plaines. Mais dès ce jour Adam , déchu de son état, D'un tribut de douleur paya son attentat. Il fallut qu'au travail son corps, rendu docile , Forçât la terre avare à devenir fertile. Le chardon importun hérissa les guérêts , Le serpent venimeux rampa dans les forêts ; La canicule en feu désola les campagnes ; L'aquilon en fureur gronda sur les montagnes. Alors pour se couvrir durant l'âpre saison, Il fallut aux brebis dérober leur toison. La peste en même temps, la guerre et la famine, Des malheureux humains jurèrent la ruine.
Epit.
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Ce qui doit frapper le plus dans ce morceau, c'est la beauté des tours et des expressions poétiques. Les personnes de goût ne manqueront pas de faire attention à celle-ci Tracát à pas tardifs un pénible sillon, etc. Un tribut de douleur, etc. Hérissa les gueréts, etc. Aux brebis leur toison. Il ne faut avoir pour cela que
du sentiment; et ces remarques .seraient inutiles , si elles n'étaient destinées pour les jeu
gens à qui elles sont nécessaires pour leur former
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