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10 N'allez desirer un surmulet, etc. v. 37. Il paroît que Juvenal fait allusion au fameux surmulet qui, selon Sénèque (Epist. xcv), fut envoyé au marché par Tibère, et acheté cinq mille sesterces par un nommé Octavius. Une ville, disoit Caton le censeur, où un poisson coûte plus cher qu'un bœuf, ne sauroit subsister long-temps. Voyez, sur le surmulet, Sat. iv, note sur le v. 15.

11 Et Pollion mendie le doigt nu, V. 43.) Voyez Sat. 1, note

sur le vers 28.

(L'anneau étoit le signe distinctif des chevaliers : les débauchés de Rome poussoient le déréglement jusqu'à sacrifier cette marque honorable de leur dignité, pour satisfaire leur gourmandise. J. P.)

12 Et courent à Baies se régaler d'huîtres, v. 49.) On trouve dans un grand nombre d'éditions ad Ostia currunt. J'ai déja observé, sur le vers 171 de la Sat. VIII, qu'il faudroit ad Ostiam, s'il s'agissoit de la ville d'Ostie: mais plusieurs manuscrits portent ici ad ostrea, et le sens l'exige. Les huîtres de Circei, sur la côte de Baies, étoient renommées ; c'est pourquoi les prodigues et les banqueroutiers, accoutumés à la bonne chère, préféroient cette ville à toutes les

autres.

13 Le bruyant quartier de Suburre pour habiter les Esquilies, v. 51.) C'est-à-dire, passer d'un quartier fréquenté dans un autre qui l'est moins.. Le quartier de Suburre fut toujours très-peuplé; mais les Esquilies, long-temps désertes, ne furent habitées, sous Auguste, que lorsque Mécène y eut fait bâtir une vaste maison, accompagnée de superbes jardins.

14 Combien avons-nous de citoyens qui veuillent retenir dans la

ville la pudeur, devenue ridicule et forcée de s'exiler? v. 54.) Le traducteur fait violence au latin pour donner un autre sens à ce passage: Que dis-je ? leur front ne rougit plus; on en voit peu que la pudeur, aujourd'hui si ridicule, force à s'exiler de Rome. Mais il n'y a aucune trace, dans le texte, de cette liaison, Que dis-je ? mais pauci morantur pudorem ne peut signifier, peu sont sensibles à la honte. Il me semble qu'avec la traduction que je propose la suite des idées est beaucoup plus naturelle. Juvénal vient de dire que les banqueroutiers, en fuyant la ville, ne regrettent que les jeux du cirque, et il ajoute qu'il n'y a plus de pudeur à Rome. Voici au reste la note de Dusaulx. J. P.

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Je ne sache pas que ces deux vers aient été bien expli. qués. Voyons si je serai plus heureux. Pauci morantur pudorem ridiculum et fugientem ex urbe, c'est-à-dire, qui pudor cogit ex urbe fugere. Peu sont sensibles à cette honte ridicule qui fuit de la ville; c'est-à-dire, il y en a peu que la honte force à s'exiler de Rome. Cette honte, qui leur feroit fuir les regards de leurs concitoyens, seroit regardée comme une chose pusillanime et ridicule. Voilà, ou je me trompe fort,

véritable sens d'ailleurs cette interprétation est claire, conforme au texte, et il y a de la suite dans le raisonnement. En effet, que prétend Juvénal? Il prétend que les « prodigues obérés sortoient de la ville pour chercher quel que autre endroit où ils pussent encore faire bonne chère. Etoit-ce par honte qu'ils s'évadoient? non, car ceux qui avoient recours à l'évasion trouvoient la chose aussi simple que de changer de quartier. Le sens que j'ai suivi n'est donc qu'un résultat naturel de tout ce qui précède. Grangaus est si loin de cette interprétation, qu'il veut que l'on écrive pudorem fugientem ez orbe, au lieu de ex urbe.

15 Je mangerai de la bouillie, etc., v. 58.) Puls étoit une espèce de bouillie ou de flanc, que l'on faisoit avec de la farine détrempée dans de l'eau; on y mettoit quelquefois des œufs et du miel. Pline (Lib. xxxvII, cap. 8) dit que les Romains s'en nourrissoient avant de connoître l'usage du pain. Il en sera encore parlé Sat. XIV, V. 171 :

......

Grandes fumabant pultibus ollæ.

16 Avec la même frugalité qu' Evandre, etc. v. 6r.) Virgile ( Æneid. Lib. vII) dit:

et plus bas :

Tum res inopes Evandrus habebat.

Dum tecta subibant

Pauperis Evandri.

17 L'un du milieu des flammes, l'autre du sein des ondes, v. 63.) On sait qu'Hercule dressa lui-même le bûcher sur lequel il fut consumé. Quant à Énée, ayant disparu dans un combat, on crut qu'il s'étoit noyé dans le Numice, rivière voisine de Lavinium; et c'est pourquoi, selon Tibulle (Lib. II, eleg. 5), cette rivière lui fut consacrée :

Illic sanctus eris, quum te veneranda Numici
Unda deum cœlo miserit indigetem.

18 Il n'en accouroit pas moins à ce repas avant l'heure ordinaire, v. 88.) Tous les auteurs attestent la frugalité des anciens Romains et l'austérité de leurs lois somptuaires : en 591, la loi Fannia fixa ce que l'on pouvoit dépenser par repas et à certains jours de fête. En 642, le tribun P. Licinius Crassus proposa une autre loi qui ne faisoit, en quelque

sorte, que confirmer la première :'cette loi fut adoptée par le sénat, et exécutée avant d'avoir reçu la sanction du peuple. La loi de Licinius fut tempérée par Cornélius Sylla ; et le luxe, dont Juvénal a suivi les progrès, la fit enfin oublier.

19 Quand un censeur craignait pour lui-même la rigueur de son collegue, etc. v. 91.) Il paroît que Juvenal fait ici allusion aux censeurs Livius Salinator et Claudius Nero, qui, l'an de Rome 548, se notèrent à l'envi, en faisant la revue des chevaliers, et se forcèrent réciproquement à vendre leur cheval; affront par lequel on perdoit le rang de chevalier. (Tit. Liv. lib. xxxx, cap. 37.)

20 Personne ne regardoit comme une affaire sérieuse le som de connoître les parages où nageoient dans l'Ocean], etc. v. 94.) La plupart des éditeurs, malgré la leçon des plus anciens et des meilleurs manuscrits, ont écrit ici Oceani au lieu d'Oceano : la même faute se trouve au vers 113. J'ai rétabli ces deux hellénismes.

(La plupart des manuscrits et des anciennes éditions portent Oceani; c'est aussi la leçon de tous les manuscrits de Paris, à l'exception de trois. Je ne vois donc pas pourquoi l'on tiendroit à la locution très-rare de Oceano fluctu. Aucun écrivain du siècle d'Auguste n'a employé Oceanus adjectivement, et l'on a dû sans doute éviter, dans toutes les langues, qu'un même mot fùt à la fois adjectif et substantif. J. P.)

21 Avoit pour toute décoration la tête d'un áne couronné, v. 97.) Toutes les éditions portent vile caput; mais Ferrarius (Elect. x1, 26) a prouvé, d'après un passage d'Hygin (fabula CCLXXIV), qu'il faut vite. Voici le passage dans lequel il paroît que l'on croyoit que l'âne, broutant la vigne, en

avoit originairement appris l'usage: Antiqui nostri in lectis tricliniaribus, in fulcris, capita asellorum, vite alligata habuerunt significantes, vini suavitatem invenisse.

(La leçon vite n'est qu'une conjecture d'Henninius tous les manuscrits portent vile, qui offre un sens plus clair et qu'il ne faut pas changer sans nécessité. J. P.)

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22 Incliné sur le sommet du casque, etc. v. 107.) Mars servoit de cimier, et son attitude étoit menaçante ; c'est ce que signifie pendentisque dei. Quant au cimier, c'est l'ornement placé au haut d'un casque. Hérodote en attribue l'invention aux Cariens. Les anciens en portoient pour inspirer la terreur à leurs ennemis. On en portoit aussi par superstition, comme Tacite le dit des. Estyens, peuples voisins de la mer Baltique. Plutarque (Vie de Pyrrhus) dit que ce prince portoit pour cimier un grand panache et des cornes de bouc, etc.

Ne pourroit-on pas reprocher à Juvénal de s'être trop complu dans la description de ce casque ? Premièrement, il n'est pas vraisemblable que les Romains eussent alors des artistes capables de grouper tant de figures. Secondement, si le soldat était assez grossier pour être insensible aux arts de la Grèce, pouvoit-il s'intéresser beaucoup plus aux arts du Latium, en supposant qu'ils existassent ? Mais il ne faut pas tant scruter les poëtes, dont le premier mérite est de parler à l'imagination.

23 C'est sur des plats de Toscane qu'étoit servic ia farine bouillie; le peu d'argent que chacun possédoit, etc., v. 108.) Dans l'édition de Dusaulx, comme dans la plupart des éditions modernes on a interverti l'ordre des deux vers Pone

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